Responsabilité décennale : la clause de conciliation prévue par l’Ordre ne s’applique pas

La clause de conciliation préalable prévue dans les contrats de l’Ordre des architectes ne s’applique que si elle porte sur les engagements contractuels des parties, et non en matière de responsabilité décennale.
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La Cour de cassation a rappelé dans un arrêt du 23 mai 2019, qu’en matière de responsabilité décennale, la clause de conciliation préalable du Conseil régional de l’Ordre des architectes prévue dans un contrat entre un architecte et son client ne s’applique pas.

En l’espèce, un maître d’ouvrage, qui a entrepris de faire édifier une maison d’habitation, a confié une mission de maîtrise d’œuvre à une société d’architecture et l’exécution des travaux de gros-œuvre à un entrepreneur. Une fois les travaux réceptionnés, l’entrepreneur a assigné le maître d’ouvrage en paiement du solde restant dû. Le maître d’ouvrage se plaignant de désordres empêchant d’utiliser l’immeuble conformément à sa destination d’habitation, et résultant notamment des infiltrations d’eaux pluviales et de l’impossibilité de réaliser les dallages extérieurs, a appelé à l’instance la société d’architecture, sollicité une expertise et réclamé l’indemnisation des préjudices.

La Cour d’appel de DOUAI a, dans un arrêt du 18 janvier 2018, déclaré irrecevable l’action à l’égard de la société d’architecture car le contrat d’architecte prévoyait une clause selon laquelle « En cas de différend portant sur le respect des clauses du présent contrat, les parties conviennent de saisir pour avis le conseil régional de l’Ordre des architectes dont relève l’architecte, avant toute procédure judiciaire, sauf conservatoire ». Le maître d’ouvrage n’a pas mis en œuvre cette procédure avant la procédure d’expertise.

Les juges de la Cour d’appel vont estimer d’une part que le défaut de mise en œuvre d’une procédure contractuelle de conciliation préalable à une action judiciaire avant la saisine de la juridiction du premier degré ne peut être régularisé en cause d’appel. D’autre part, ils jugent la demande irrecevable puisque le maître d’ouvrage n’a pas saisi pour avis pour avis le conseil régional de l’Ordre des architectes avant la présentation de sa demande contre la société d’architecture en première instance. Il s’agit là d’un rappel d’une jurisprudence constance bien établie de la Cour de Cassation (Cass. Ch. Mixte, 14 fev. 2003 n° 00-19423 00-19424).

Pour autant, la Cour de Cassation va casser et annuler la décision rendue par la Cour d’appel car elle considère « Qu’en statuant ainsi, sans rechercher, au besoin d’office, si l’action, exercée postérieurement à la réception de l’ouvrage, en réparation de désordres rendant l’ouvrage impropre à sa destination, n’était pas fondée sur l’article 1792 du code civil, ce qui rendait inapplicable la clause litigieuse, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ».

En clair, la clause de conciliation n’est pas applicable en matière de responsabilité décennale. Cette solution avait déjà été affirmée par les juges (Cass. 3ᵉ civ., 23 mai 2007, n° 06-15.668). 

La clause de conciliation prévue dans les contrats de l’Ordre des architectes ne s’applique donc que si elle porte sur les engagements des parties qui font la force obligatoire du contrat au sens de l’article 1103 du code civil.

 

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Publié le 18.06.2019 - Modifié le 19.06.2019
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