Provence-Alpes-Côte d'Azur

Hommage à Henri Ciriani

Bien qu’il n’ait pas été inscrit au tableau de l’Ordre dans notre région, l'empreinte d’Henri Ciriani y demeure indélébile, en particulier à travers la réalisation du Musée départemental Arles antique, véritable chef-d’œuvre d’équilibre, de clarté et d’intelligence spatiale. 

 

Publié le
, mis à jour le
16 octobre 2025
Henri Ciriani

Henri Ciriani

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« Dans l’architecture moderne, n’est fixe que ce qu’on veut bien éclairer. 
La lumière donne à voir ; elle immobilise un élément, le pétrit et le pétrifie. » 

— Henri Ciriani, L’Architecture d’Aujourd’hui, n° 274, avril 1991 

C’est par ces mots, empreints d’espoir et de modernité, que le Conseil régional de l’Ordre des architectes de Provence-Alpes-Côte d’Azur souhaite ouvrir cet hommage à Henri Ciriani (1936–2025), figure majeure de l’architecture contemporaine. 

L’œuvre d’Henri Ciriani transcende les générations, les courants et les frontières. Son approche, à la fois rigoureuse, fonctionnelle et poétique, a profondément marqué la culture architecturale, tant en France qu’à l’échelle internationale. 

En France, il a durablement influencé la conception de l’architecture publique au cours de la seconde moitié du XXe siècle, notamment par ses réalisations exemplaires en matière d’espaces collectifs et de logement social. 

Bien qu’il n’ait pas été inscrit au tableau de l’Ordre dans notre région, son empreinte y demeure indélébile, en particulier à travers la réalisation du Musée départemental Arles antique, véritable chef-d’œuvre d’équilibre, de clarté et d’intelligence spatiale. 

Par ce projet, il conçoit un édifice conciliant exigence programmatique et expression sensible, pensé pour satisfaire l’ensemble des missions fondamentales d’un musée : transmettre les vestiges, diffuser le patrimoine et garantir à toutes et à tous un accès équitable à la culture et à la documentation historique. 

Toutefois, l’extension ultérieure de cet édifice, réalisée sans son aval, viendra altérer la portée de son œuvre selon son concepteur. 

Pour rappel, le département des Bouches-du-Rhône, maître d’ouvrage du musée, envisageait la création d’une extension destinée à accueillir une "barge romaine" découverte dans le Rhône, ainsi que d'autres artefacts liés à la navigation fluviale. 

Des travaux ont été engagés sans que l’architecte ait donné son autorisation. Estimant que ces modifications portaient atteinte à l’intégrité de son œuvre, Henri Ciriani a engagé une action en justice afin que ces "dénaturations" soient qualifiées de contrefaçon, et a sollicité la remise de l’édifice dans son état initial. 

Par jugement du 17 janvier 2013, le Tribunal de grande instance de Marseille a reconnu l’atteinte portée au droit moral de l’auteur et a condamné le maître d’ouvrage à lui verser des dommages et intérêts. Toutefois, la demande tendant à la remise en état a été rejetée. 

La cour d’appel d’Aix-en-Provence, par arrêt du 7 janvier 2016, a confirmé cette décision en précisant que le droit au respect de l’œuvre devait être mis en balance avec le droit de propriété du maître d’ouvrage, dès lors que celui-ci poursuit une finalité d’utilité publique. Ainsi, l’auteur ne peut s’opposer qu’aux modifications qui ne seraient ni nécessaires à l’usage du lieu, ni proportionnées à l’objectif poursuivi. 

 En d'autres termes, s’il avait déjà été jugé que les exigences de sécurité ou de salubrité ne confèrent pas à un bâtiment un caractère intangible, la cour d’appel a ajouté ici que la nécessité fonctionnelle d’agrandir le musée permettait également d’écarter l’exigence d’une stricte conservation de la forme originelle. 

Henri Ciriani conservera de cette affaire un profond sentiment d’injustice. 
Lors de la remise de la médaille du Palmarès de l’Académie d’Architecture en 2012, il confiait que cette distinction représentait pour lui « une lumière dans un moment de noirceur immense… Sans cette lumière, je n’aurais sans doute pas résisté. » Il ajoutait alors : « La lumière est un don de la nature. Il faudrait transformer ce qui est déjà là en magie, sans que les efforts ne soient visibles. » 

À travers cet hommage, le Conseil régional de l’Ordre des architectes de Provence-Alpes-Côte d’Azur salue avec respect la mémoire d’Henri Ciriani, et réaffirme son attachement à la défense du droit moral des auteurs, condition essentielle à la vitalité et à la protection de notre culture architecturale. 

 

Sources 
https://www.batiactu.com/edito/palmares-academie-architecture-2012-emotion-et-symboles-32401.php 

https://www.batiactu.com/edito/deces-architecte-franco-peruvien-henri-ciriani-72494.php 

https://ciriani-en-arles.blogspot.com/p/blog-page.html? 

https://charrel-avocats.com/wp-content/uploads/2016/01/CA-AIX-7-janvier-2016.pdf 

 

Francis Fernandez 
Juriste à l’Ordre des Architectes PACA 

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