Grand Est
Exercice professionnel

Succession de missions

Lorsqu'un architecte succède à un autre, un certain nombre de démarches sont à respecter dans le cadre de la confraternité et de la propriété artistique.
Publié le
, mis à jour le
1 mai 2024
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Succession missions
Succession missions
CROA GE

1- Les démarches liées à la confraternité

L’article 22 du code des devoirs professionnels (CDP) indique que « L'architecte appelé à remplacer un confrère dans l'exécution d'un contrat ne doit accepter la mission qu'après en avoir informé celui-ci, s'être assuré qu'il n'agit pas dans les conditions contraires à la confraternité et être intervenu auprès du maître d'ouvrage pour le paiement des honoraires dus à son prédécesseur. Il doit informer le Conseil Régional de l'Ordre dont il relève.(...) ».
Cet article s’applique dès qu’il y a interruption avant terme de la mission d'un premier architecte (suite à une résiliation du contrat par exemple) et sa poursuite par un autre architecte. Dans ce cas, avant d’accepter la mission, l’architecte successeur doit informer par écrit : 

- l’architecte initial de la reprise envisagée. Il doit lui demander si ses honoraires ont été soldés et l’informer, le cas échéant, des modifications envisagées. Mais il ne s’agit pas d’une demande d'autorisation.
- le maître d’ouvrage de l’obligation de paiement de l’architecte initial s’il ne l’a pas encore intégralement réglé, et lui rappeler le droit moral de l’architecte initial. 

En cas de non-paiement des honoraires réclamés, il appartient à l'architecte créancier de faire valoir ses droits auprès du maître d'ouvrage par toutes voies : amiables (médiation du consommateur, conciliation via l'ordre) ou judiciaire. L‘architecte « successeur » n’a pas forcément à attendre l’issue du litige pour débuter sa mission. 

- le Conseil régional de l’Ordre des architectes de ces démarches en lui transmettant une copie des courriers adressés au maître d’ouvrage et à l’architecte initial. 

En cas de doute sur l'application de l'article 22 du CDP, au cas d’espèce dans lequel on se trouve, il est fortement conseillé de vérifier auprès du premier architecte la réalité de la situation. D’autant que l’obligation générale de confraternité entre architectes s’applique quel que soit le cas ("Les architectes sont tenus d'entretenir entre eux des liens confraternels, ils se doivent mutuellement assistance morale et conseils" article 17 du CDP). Enfin, au titre de l'obligation d'assurance, un échange entre l’architecte initial et le successeur sera toujours utile afin que chacun puisse déterminer clairement sa part de responsabilité. 

 

2- Le respect de la propriété artistique en cas de modification de l’œuvre (le droit moral au nom et le droit au respect de l‘œuvre) 

Aux termes de l’article L 121-1 du Code de la Propriété Intellectuelle (CPI), tout auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son oeuvre. C’est pourquoi, en cas de projet de modification d’une œuvre architecturale* initiale, l’information préalable de son auteur est requise en application du droit au respect de l’œuvre, dans tous les cas, que l’article 22 du CDP s’applique ou pas.
Ce droit ne va pas jusqu‘à donner à l’auteur initial la possibilité d’interdire de modifier un ouvrage, même si celui-ci peut être qualifié d’œuvre*. S’agissant d’ouvrages à vocation utilitaire, la jurisprudence est venue assouplir depuis longtemps ce droit, pour tenir compte des évolutions et adaptations rendues nécessaires (voir la note sur le droit moral). 

L’œuvre modifiée dite « oeuvre composite » selon l'article L. 113-2. du CPI (« œuvre nouvelle à laquelle est incorporée une œuvre préexistante sans la collaboration de l’auteur de cette dernière ») est la propriété de l'auteur qui l'a réalisée, sous réserve des droits de l'auteur de l'œuvre préexistante. Les 2 auteurs ont, sur l'œuvre dérivée, des droits concurrents : 

- en vertu du droit au nom l’auteur initial a le droit de voir figurer son nom, au même titre que celui de l’architecte auteur du nouveau projet, sur l'œuvre dérivée et sur tous documents se rapportant au projet modifié.
- d’une manière générale, l'auteur de l'œuvre composite qui veut exploiter sa création doit obtenir l'autorisation de l'auteur de l'œuvre préexistante. 

*Rappel : la création architecturale est protégée à tous les stades de son expression, quelle que soit sa forme, dès lors qu’elle est matérialisée, si on peut la qualifier d’œuvre. Ce qui suppose qu’on y retrouve l’empreinte de son auteur (des plans ou croquis qui ne feraient que traduire graphiquement des aspects purement techniques ne seraient pas protégés). 

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