Ce que change la nouvelle loi ZAN

Le parlement a voté le 13 juillet dernier la loi visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux, dite loi ZAN (publiée au JO du 21 juillet 2023). Elle ne remet pas en question les objectifs de réduction de l’artificialisation de la loi Climat et Résilience, mais cherche à surmonter les difficultés juridiques et pratiques rencontrées dans les territoires.
L’artificialisation des sols est une altération de leurs fonctions naturelles par des activités humaines. Sur la période 2011-2021, c’est près de 250 000 hectares qui ont été artificialisés, c’est-à-dire que des espaces naturels, agricoles ou forestiers (ci-après, Enaf) ont été construits ou aménagés. Ce rythme est insoutenable, car les sols remplissent de nombreuses fonctions écologiques essentielles, comme le stockage du carbone, l’infiltration de l’eau ou la préservation de la biodiversité. La transition vers une société soutenable implique leur protection.
Dès la loi Alur de 2014 (Loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové), l’analyse de la consommation d’espaces est devenue obligatoire dans les PLU et les SCOT. Cependant, il n’existait pas alors de définition précise de cette notion de consommation d’espace et aucun dispositif coercitif n’était prévu.
La Loi Climat et résilience du 22 août 2021 est venue pallier ces lacunes en élevant la lutte contre l’artificialisation des sols au statut d’objectif opposable en matière d’urbanisme. L’artificialisation des sols devra être compensée par des opérations de renaturation dans des proportions de plus en plus importantes, jusqu’à ce qu’elle soit entièrement compensée en 2050.
Une mise en œuvre difficile de la loi Climat et Résilience
La loi Climat et Résilience a fixé l’objectif de Zéro Artificialisation Nette en 2050, avec un objectif intermédiaire de réduction de l’artificialisation de 50 % en 2030, par rapport à la période 2011-2021.
Toutefois, les élus locaux ont pu relever des problèmes dans la méthode de mesure de l’artificialisation, mais également sur les périodes prises en compte pour la renaturation, ou encore sur le fait que les délais pour modifier les documents d’urbanisme soient trop courts à leurs yeux et, enfin, sur le fait que l’objectif ZAN tel que défini dans la loi Climat et Résilience puisse être inadapté aux besoins des politiques locales (eu égard notamment aux besoins en infrastructure, au recul du trait de côte…).
La loi ZAN est venue y remédier notamment en donnant plus de pouvoir aux collectivités territoriales dans le dialogue et dans l’application des objectifs de réduction de l’artificialisation nette.
Les principales évolutions apportées par la nouvelle loi
À travers ses neuf articles, la loi ZAN introduit plusieurs précisions quant à la mise en œuvre effective du ZAN dans les territoires.
- Tout d’abord, l’objectif ZAN devra être pris en compte dans l’ensemble des opérations d’aménagement. Pour tout projet urbain, les élus locaux devront chercher à sauvegarder les espaces naturels, renaturer des sols désartificialisés, mettre en valeur le bâti existant, et rechercher l’optimisation des espaces urbanisés. Il n’y a pas de dispositif coercitif, mais cet objectif devra être pris en compte par les élus dans leurs décisions pour l’ensemble des projets de la collectivité.
- Ensuite, la loi ZAN a rallongé les délais laissés aux collectivités pour la modification des documents d’urbanisme. Désormais, les régions auront jusqu’au 22 octobre 2024 pour mettre le SRADDET en conformité avec la loi ; les communes et EPCI auront jusqu’au 22 janvier 2027 pour modifier les SCoT et jusqu’au 22 janvier 2028 pour les PLU(i).
- Afin de rééquilibrer la représentation des territoires dans la coordination et la gouvernance, la loi a transformé la Conférence des schémas de cohérence territoriale en Conférence régionale de gouvernance de la politique de réduction de l’artificialisation des sols.
Ce nouvel espace de dialogue doit être institué dans chaque région. Sa composition et le nombre de membres sont déterminés par délibération du conseil régional prise sur avis conforme de la majorité des organes délibérants des EPCI compétents en matière de PLU. Elle réunit : quinze représentants de la région, cinq représentants des établissements publics mentionnés à l'article L. 143-16 du Code de l'urbanisme, quinze représentants des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de documents d'urbanisme, dont un représentant au moins par département et trois représentants des établissements non couverts par un schéma de cohérence territoriale ; sept représentants des communes compétentes en matière de documents d'urbanisme, dont un représentant au moins par département ; cinq représentants des communes non couvertes par un document d'urbanisme ; un représentant de chaque département, siégeant à titre consultatif et cinq représentants de l'Etat.
Chaque conférence est chargée de deux principales missions :
- D’une part, elle doit remettre un rapport au Parlement entre le 1er juillet et le 31 décembre 2027, faisant état du niveau de consommation foncière au regard des objectifs de réduction de l’artificialisation des sols au niveau régional ;
- D’autre part, elle présentera, au plus tard le 1er janvier 2031, un bilan de l’application de la surface minimale de consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers et pourra proposer des pistes de réduction de cette surface minimale.
- La loi prévoit par ailleurs que les projets dits de grande ampleur ne seront pas comptabilisés dans la consommation d’Enaf des collectivités pour la première tranche des 10 ans. Il s’agit notamment des travaux déclarés d’utilité publique, de certains projets industriels, des lignes ferroviaires à grande vitesse, des aménagements de postes électriques de haute tension, ainsi que des travaux réalisés sur les grands ports de l’État. S’agissant de ces projets de grande ampleur, la consommation d’espaces engendrée sera prise en compte au niveau national dans la limite d’un forfait fixé à 12 500 hectares.
- Est ensuite prévue une "garantie minimale de développement" pour chaque commune. Cette garantie de 1 hectare pour la première période décennale 2021-2031, sera applicable à l’ensemble des communes à condition pour elles d’être couvertes par un document d’urbanisme (PLU(i), document en tenant lieu ou carte communale) approuvé avant le 22 août 2026.
Concrètement, lors de la répartition des objectifs de consommation entre les différentes collectivités, chaque commune devra bénéficier d’au moins un hectare d’espace naturel, agricole et forestier qu’elle pourra consommer, c’est-à-dire artificialiser.
- La loi prévoit ensuite de prendre en compte les spécificités des communes littorales. En effet, les surfaces artificialisées situées dans une zone exposée au recul du trait de côte pourront être considérées comme désartificialisées dès lors qu’elles feront l’objet d’une renaturation dans le cadre d’un projet de recomposition de l’espace du territoire littoral (Code de l’environnement, article L. 321-15-1).
- Un nouveau droit de préemption est institué pour les communes. Ces dernières pourront délimiter dans leurs PLU des secteurs qui présentent un potentiel majeur pour l’atteinte des objectifs de la loi ZAN, dans lesquels la commune pourra préempter. Il s’agira soit d’un terrain qui dispose d’un potentiel de renaturation, soit d’un espace urbanisé qui peut être réutilisé pour un projet.
- Enfin, la loi ZAN prévoit qu’un sursis à statuer pourra être opposé à une demande d’autorisation d’urbanisme entrainant une consommation d’Enaf.
Le sursis à statuer est prévu par le Code de l’urbanisme et permet à l’autorité compétente de différer dans le temps la réponse à une demande d’autorisation d’urbanisme, pour éviter de compromettre une opération d’aménagement ou la modification d’un document d’urbanisme. L’autorité compétente suspend la décision d’urbanisme qui aurait dû être délivrée au regard de la réglementation actuelle dans l’attente de l’entrée en vigueur de la nouvelle règle plus stricte, ce qui permet d’interrompre les délais d’instruction empêchant l’acquisition d’une autorisation d’urbanisme tacite.
Le Code de l’urbanisme prévoit que le sursis à statuer doit être motivé et ne peut excéder deux ans. A l’expiration de ce délai, une décision doit, sur confirmation par l'intéressé de sa demande, être prise par l'autorité compétente chargée de la délivrance de l'autorisation, dans le délai de deux mois suivant cette confirmation ce qui signifie que les services instructeurs ne se saisissent pas d’office.
Seuls certains cas limitativement énumérés par le code permettent le sursis à statuer et la loi zéro artificialisation nette a créé un nouveau cas : les projets artificialisants qui pourraient compromettre l’atteinte des objectifs ZAN fixés par les documents d’urbanisme en cours d’élaboration.
Un tel sursis ne pourra cependant pas être opposé à un projet qui prévoit une compensation de la consommation d’Enaf par une renaturation au moins équivalente.
- Publié le 26.09.2023 - Modifié le 27.09.2023
- Publié le 26.09.2023 - Modifié le 26.09.2023
- Publié le 26.09.2023 - Modifié le 26.09.2023
- Publié le 25.09.2023 - Modifié le 27.09.2023
- Publié le 25.09.2023 - Modifié le 27.09.2023
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OK très bien. Et on fait quoi des avis ABF qui nous empechents les surélévations d'un mètre de haut, qui ne se voit pas depuis l'epsace public et qui nous force à faire des extensions à la place???